
Analyse budgétaire : une santé publique affaiblie de 269 millions pour la période 2024-2026
Suite au communiqué de presse portant sur le budget 2025-2026, plusieurs employé·es de l’ASPQ ont épluché les documents mis à disposition par le ministère des Finances et le Conseil du trésor.
5 faits ont été résumés dans l’infographie suivante. Ils sont détaillés dans les lignes ci-dessous.
Le constat est clair : la santé publique est affaiblie avec 269 millions de moins pour la période 2024-2026, aucune mesure fiscale pour favoriser la prévention et 0 $ pour la PGPS. Les 15 millions pour la Stratégie nationale intégrée de prévention en santé ne suffiront malheureusement pas à rattraper ces coupes importantes.
1. 142 millions de dollars de moins que prévu pour la santé publique en 2024-2025 (Budget de dépenses 2024-2025 – Crédits et dépenses des portefeuilles – page 424)
À la section C.22 du budget, on souligne une évolution exceptionnelle du budget de la santé publique depuis 2018-2019, en lien direct avec l’effort vaccinal et l’achat de matériel de protection notamment.
Rappelons que les crédits autorisés pour la santé publique sont passés de 427,6 millions de dollars à 1 122 millions de dollars entre 2018-2019 et 2024-2025, soit une augmentation de plus de 162 %. (Budget 2025-2026 – Section C.22)
Malheureusement, ces prévisions d’un montant de 1 122 millions de dollars pour la santé publique en 2024-2025, qui correspondaient à seulement 2 % du budget de la santé, n’ont pas été entièrement affectées à cette fin. Selon la page 426 du document de crédits et dépenses des portefeuilles, l’argent véritablement investi pour la santé publique en 2024-2025 a été de 980 millions de dollars, soit 142 millions de moins que le budget projeté.
2. Une baisse du budget de santé publique de 127 millions en 2025-2026 (Budget de dépenses 2025-2026 – Crédits et dépenses des portefeuilles – page 426)
Pour 2025-2026, le budget de la santé publique est fixé à 995 millions de dollars : soit moins de 1,75 % du budget total de la santé (proportion spécifiée par les fonctionnaires lors du huis clos). Considérant que le budget de l’an dernier prévoyait investir 1,122 milliard de dollars, le manque à gagner est de 127 millions ; sans compter l’inflation. Par conséquent, la part du budget de la santé publique s’amincit et s’éloigne encore plus des sommes allouées dans d’autres provinces, comme l’Ontario et la Colombie-Britannique, supérieures à 5 % du budget de la santé.
De plus, avec le nouvel organigramme de la santé au Québec, rien n’indique que les budgets de santé publique seront protégés. Alors que le MSSS donnait des règles strictes en matière d’utilisation des fonds réservés à des projets particuliers, les lignes sont plus floues quant aux directives de Santé Québec envers les CISSS et les CIUSSS pour l’utilisation des fonds en santé publique.
3. Aucune mesure fiscale pour favoriser la prévention
Alors que la taxation des boissons sucrées ou l’augmentation de la taxation du tabac auraient pu contribuer à faire face aux incertitudes économiques actuelles et à améliorer la santé de la population, le gouvernement opte pour le statu quo. Pourtant, les taxes sur les produits néfastes pour la santé ont fait leurs preuves pour la santé de la population et le soutien d’initiatives de prévention. La population y est aussi favorable. C’est une occasion manquée.
4. 0 $ pour la Politique gouvernementale de prévention en santé (PGPS) (Plan d’action interministériel 2022-2025, p 75)
Beaucoup d’organismes comptaient sur la prolongation de la PGPS, dont le plan d’action en cours se termine en 2025.
Malheureusement, aucun montant n’est prévu pour cette politique dans le futur, faisant passer son financement de 40 millions l’an dernier à 0$.
Cette situation laisse entrevoir l’interruption de nombreux projets de prévention, incluant de rares actions intersectorielles, ainsi qu’une fragilisation de nombreux organismes qui desservent une multitude de populations sur le terrain.
5. Seulement 15 millions pour la Stratégie nationale intégrée de prévention en santé
On ne peut que se réjouir qu’un montant soit affecté à cette stratégie.
En revanche, ce seul montant sera fortement insuffisant dans un contexte de régression des investissements en santé publique et en prévention.
Si le budget actuel affaiblit la santé publique, la mobilisation pour la prévention restera forte. Ensemble, nous continuerons à réclamer des actions concrètes pour que les 4 leviers indispensables à une réduction durable de la maladie au Québec soient mis en place. Un investissement conséquent est un incontournable.