X

// Nouvelles

Quand la santé s’invite au cœur de l’adaptation climatique

Quand la santé s’invite au cœur de l’adaptation climatique


Les liens entre adaptation aux changements climatiques et santé sont de plus en plus évidents au Québec. Chaleur accablante, inondations, feux de forêt : ces phénomènes exacerbent les inégalités sociales de santé et nécessitent des réponses innovantes et concertées. Il allait donc de soi que les enjeux de santé prennent plus de place dans la récente édition du symposium d’Ouranos sur l’adaptation climatique, qui s’est déroulée du 28 au 29 janvier dernier à Montréal et auquel a pu assister l’équipe santé-climat de l’ASPQ.

Voici donc un résumé des initiatives présentées lors du symposium qui portaient les liens entre la santé et l’adaptation aux changements climatiques.



Évaluer les aléas climatiques pour mieux protéger la santé

Les aléas climatiques touchent fortement les populations, en particulier les plus vulnérables. Il est donc essentiel de bien les évaluer pour mieux s’y adapter, ce qui constitue l’objectif du projet VRAC-PARC.

Lancé en 2019, le projet VRAC-PARC est une initiative coordonnée par l’INSPQ, en partenariat avec le MELCCFP, le MSSS et Santé Québec (1). Dans le cadre du projet s’échelonnant jusqu’en 2027, il permet aux Directions de santé publique (DSP) d’évaluer les vulnérabilités et les risques climatiques de leurs territoires (volet VRAC). Elles élaborent ensuite des plans d’adaptation régionaux pour atténuer les impacts sur la santé (volet PARC). Le projet encourage une collaboration étroite avec les parties prenantes régionales, y compris les municipalités et les organisations communautaires. Pour consulter les rapports VRAC.

Les risques climatiques touchent aussi le monde du travail. L’équipe ATACC (Adaptation du travail aux changements climatiques) de l’INSPQ a identifié 11 dangers exacerbés par les changements climatiques, exposant les travailleur·euses à des risques accrus. Par exemple, la perturbation des écosystèmes aquatiques intensifie les impacts psychosociaux et les risques d’accidents pour les travailleur·euses de l’agriculture, de la foresterie et de la chasse et pêche. Pour consulter le cadre conceptuel et les activités d’ATACC.

Les zoonoses représentent également une menace croissante. L’INSPQ a cartographié les zones propices à leur transmission dans un contexte de changements climatiques, révélant qu’en 2024, pratiquement toutes les municipalités du Québec sont exposées aux tiques. Pour visualiser les cartes de zoonoses.

L’évaluation des risques est un premier pas, mais elle doit s’accompagner d’actions concrètes. L’ASPQ plaide pour une intégration plus forte des enjeux de santé dans les stratégies d’adaptation et un soutien accru aux municipalités pour mieux protéger les populations face aux défis climatiques.



Mesurer les bénéfices sanitaires des actions climatiques

Les actions de lutte contre les changements climatiques ne se limitent pas à réduire les émissions de gaz à effet de serre : elles ont aussi des effets positifs directs sur la santé publique. Le projet de recherche de Thierno Diallo en est une illustration parlante.

Son étude analyse l’impact de trois initiatives municipales à Genève en matière d’aménagement du territoire et de mobilité durable. Les résultats sont clairs : en favorisant des rues plus accessibles aux piétons et cyclistes, en réduisant la circulation automobile et en intégrant davantage d’espaces verts, ces politiques locales améliorent la qualité de l’air, encouragent l’activité physique et réduisent la pollution sonore. Autrement dit, agir pour le climat, c’est aussi agir pour la santé. Pour lire les résultats de l’étude.

Cette synergie entre environnement et santé publique est également évidente dans un autre contexte : celui des feux de forêt. L’INSPQ a analysé l’efficacité des mesures mises en place pour protéger la population lors d’épisodes de fumée intense. L’étude révèle que le port du masque N95 limite efficacement l’inhalation de particules fines et que la fermeture des écoles réduit l’exposition des enfants aux polluants atmosphériques. En revanche, la recommandation de rester à domicile pour les personnes vulnérables n’est pertinente que si les températures intérieures restent supportables.

Ces analyses montrent l’importance de mieux intégrer les politiques de santé publique aux stratégies d’adaptation aux changements climatiques. L’ASPQ continuera de promouvoir ces approches complémentaires pour renforcer la résilience des populations.



Inégalités sociales de santé : une vulnérabilité supérieure aux aléas climatiques

Vivre en Ville, en partenariat avec la Fondation du Grand Montréal, ont cartographié les iniquités territoriales face aux aléas climatiques à Montréal. Les secteurs défavorisés, c’est-à-dire qui n’offrent pas les mêmes chances de développement et d’accès à la santé et au bien-être, présentent trois fois plus d’ilots de chaleur, cinq fois moins d’ilots de fraîcheur et 28 % moins de canopée. Pour lire le rapport complet.

Le Labo Équité Climat et le CISSS du Bas-Saint-Laurent ont collaboré sur un outil proposant des balises pour assurer l’adaptation équitable aux changements climatiques, notamment dans les initiatives menées par la santé publique. L’outil a mené à la création d’un projet de mobilisation citoyenne « café-discussion » auprès des personnes vulnérables aux changements climatiques. Pour consulter l’outil.



Conclusion


Le Québec regorge d’initiatives en santé et adaptation, mais celles-ci restent largement méconnues du grand public. Pourtant, leurs porteur·euses – scientifiques et autorités sanitaires – sont parmi les messagers les plus crédibles pour parler des changements climatiques (2). Mieux valoriser leur travail et encourager leur prise de parole permettrait de mieux faire connaître les solutions existantes et d’accroître leur influence sur les décisions politiques.

Si les projets d’adaptation se multiplient, peu sont pilotés par des décideur·euses plaçant la santé au cœur de leurs priorités. Pourtant, comme l’ont souligné plusieurs expert·es et l’a rappelé le ministre Steven Guilbault lors de la plénière d’ouverture du jour 2 du symposium, il existe un consensus sur l’urgence d’adapter le Québec aux changements climatiques et de renforcer la résilience du système de santé. Pour y parvenir, il est crucial que la recherche et les expériences de terrain en santé et adaptation influencent davantage les politiques publiques. Cela passe par une meilleure collaboration entre scientifiques, autorités sanitaires, organisations locales et élu·es.

Notes

  1. Pour alléger la phrase, les acronymes ont été privilégiés. VRAC-PARC signifie « Évaluation des vulnérabilités et risques régionaux liés aux changements climatiques et plans d’adaptation régionaux au climat ». INSPQ fait référence à l’Institut national de santé publique du Québec. MELCFFP et MSSS font respectivement référence au Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, et au Ministère de la Santé et des Services sociaux.
  2. Boivin et al. (2023, juin). Communiquer sur l’adaptation aux changements climatiques dans un contexte pandémique au Québec. Rapport présenté à Ouranos et au MELCCFP.